22 avril 2016

Les meubles de Napoléon au musée de l'armée

Cela peut paraître anecdotique, mais cela fait quand même son petit effet. Les meubles de Sainte-Hélène, les vrais, sont exposés au musée de l'armée, à Paris. A voir jusqu'au 24 juillet 2016.


Il a dominé l'Europe. Fait trembler de vieux trônes vermoulus. Cela a duré quinze ans. Et puis, patatras, le voilà qui se retrouve exilé à 7500 km de la France, sur une île riquiqui de 122 km². Et du genre hostile, en plus : balayée par les vents, paumée au milieu de l'Atlantique, à 2000 km de l'Afrique, et plus de 5000 de l'Amérique du Sud...
Rajoutez un brin de mesquinerie britonne, avec des geôliers tatillons se refusant de lui donner le titre d'empereur pour ne le traiter qu'en simple général, et comprenez que Napoléon, puisque c'est de lui dont il s'agit, maugrée un peu à Sainte-Hélène. La postérité valait bien quelques années de tourments, cela dit.

Les meubles de Sainte-Hélène à Paris
L'impérial popotin s'est posé ici.


Le musée de l'armée, aux Invalides, s'intéresse justement à cette Conquête de la mémoire avec son Napoléon à Sainte-Hélène. Une jolie pépite pour qui aime la petite histoire. Et une sacrée aubaine à saisir, aussi, car on y trouve exposées les plus belles pièces de Longwood House, rapatriées en France pour restauration. Comme la plupart d'entre nous n'auront jamais l'occasion d'aller là-bas, autant en profiter, non ?
Après, évidemment, il faut être un minimum sentimental et romantique. Capable de s'extasier sur un pauvre fauteuil juste parce que l'impérial popotin s'est posé dessus... On le confesse (sans mauvais jeu de mot, ce n'est pas notre genre) (comment ça, si ?), c'est pile poil notre cas. Bon, sans verser de larmes non plus, faut pas exagérer. Mais la "reconstitution" des salles de la maison fait son petit effet, malgré tout.

Un semblant de vie de cour

Ci-dessus, l'impériale tenue d'intérieur.
Qui n'est pas sans rappeler
Marie-Pierre Casey.
Le buste du roi de Rome, son fils, par exemple. Napoléon le fait venir spécialement à Sainte-Hélène pour adoucir son exil. Il le place en majesté et passe de longs moments à le regarder, mélancolique. Car les journées sont longues là-bas. "Que dire, que faire que ce que l'on a déjà tant de fois dit et fait ?", s'interroge ainsi l'un des pauvres hères qui accompagne l'empereur déchu.
Ils ont pour nom Las Cases, Gourgaud, Bertrand, Montholon ou encore Ali. Ils sont en famille, avec femme et enfants, pour faire paraître, si loin des palais parisiens, un semblant de vie de cour. C'est pathétique à souhait. Souvent ridicule, aussi. Mais c'est ainsi. L'empire demeure. Napoléon règne sur sa maison à défaut de le faire sur l'Europe...

Travailler à la postérité pour tuer le temps

Il met à profit le monotonie des journées pour ressasser son épopée. La coucher sur le papier pour assurer sa gloire à jamais. Las Cases est là pour cela. Il en tirera son fameux Mémorial de Sainte-Hélène. Mais Napoléon ne fait pas que dicter. Ce billard, là, ne lui sert pas à jouer - il déteste ça - mais à déplier ses cartes pour mieux se souvenir de ses batailles. Et puis, parfois, l'inspiration lui vient. Il se jette alors sur tout ce qui peut servir de papier et déroule ses idées, d'une écriture nerveuse : ici, sur cette carte à jouer par exemple.
Mais voilà que, bientôt, la maladie le rattrape. La baignoire est alors son refuge. Là, il trouve un peu d'apaisement. Y reste des heures. Puis le mal s'aggrave, et c'est le lit qui l'attend. Un simple lit de camp, rudimentaire. C'est là qu'il meurt, le 5 mai 1821. Nous sommes un samedi. Il est 17h49. Comme il est de coutume, on arrête la pendule qui se trouve dans sa chambre. Et elle est là, au musée de l'armée, cette pendule. Toujours arrêtée à cette fatidique heure.

Masque mortuaire et pendule arrêtée
L'impérial masque mortuaire.


A côté, le masque mortuaire, effectué dans la foulée. Derrière, le lit. Celui-là même où il est mort. La légende du bonhomme est telle que ce meuble minable est devenu un morceau d'histoire. Il est d'ailleurs fascinant de voir que, même si l'on n'est pas adepte de ce genre de sentimentalisme - je veux dire : on est déjà passé devant la tunique de Saint-Louis, à la cathédrale de Paris, sans entrer spécialement en transe - cela fait son oeuvre. Et assez intensément encore.

Napoléon à Sainte-Hélène, la conquête de la mémoire
Musée de l'armée
Invalides
Jusqu'au 24 juillet 2016

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